Portes ouvertes et portes fermées

Aucun sens

Non, rien n’a plus aucun sens… plus rien. Que veut dire le mot "famille" lorsque ses membres sont à peine capables de vivre quelques mois maximum dans une même maison ? Ou encore lorsqu’un père abandonne sa fille ? Lorsque les liens fraternels s’étiolent au fil du temps et finissent par disparaître ? Des exemples autres que la famille, j’en ai en réserve, j’en ai des tas, des tonnes. Autant que les étoiles. Sauf qu’aucun ne m’apportera la moindre lueur.
Je me suis réveillée avec une de ces migraines atroces qui me prennent environ une fois par mois, ce matin. J’ai vu mon visage dans le miroir, j’y ai vu des débuts de cernes, j’y ai vu un regard étranger ; j’y ai vu quelque chose que je ne saurai décrire. Je ne peux pas le décrire car ça n’a pas de sens, ça n’en a plus.
J’ai à nouveau peur de finir noyée. Pourtant, je n’ai jamais eu peur de l’eau, de la mer ou d’un quelconque océan. J’ai peur de mourir noyée dans le monde. Peut-être qu’un jour, j’aurais si peur que je me jetterais moi-même dans un océan avec l’intention de m’y suicider, de me décider à mourir de cette façon plutôt que d’une autre.
Pourquoi n’y a-t-il rien qui puisse porter mon âme ? Rien qui puisse me sortir de cet affreux entre-deux, de cette survie entre vie et mort ? Certains sont émus par l’art et uniquement par l’art, mais ils ont déjà quelque chose, une passion, bien qu’il n’y en ait qu’une, qui suffit à les transporter, à les relier au monde. Moi, je suis "jeune et pleine de possibilité", dit-on, mais je n’ai rien. Je suis vide. Et tout me semble vide, aussi vide que moi. Et ceux qui disent le contraire sont soit des imbéciles heureux, soit des menteurs encore plus doués que moi puisqu’ils ont réussi à se convaincre de leurs propres mensonges.
Comment puis-je croire en quoique ce soit, désormais ? Je n’ai jamais réussi à croire à une religion quelconque. Avant, je croyais à la famille, mais cela fut de courte durée. J’ai cru assez longuement à l’amour ; jusqu’à ma rencontre avec Sol. Il m’aura au moins apprit une chose, celui-là. J’ai cru à l’amitié jusqu’à il y a un an environ, avant que chacun de mes amis me délaisse, m’abandonne ou me trahisse. Je croyais en mes études, en le pouvoir d’un dur travail finalement récompensé, et là aussi je fus sortie de mes illusions aussi sec. Je me demande s’il y a encore quelque chose en quoi je crois, à l’heure actuelle. Ah, si, il reste une chose. Mon futur voyage. C’est ma dernière croyance, le seul de mes rêves qui n’a pas encore été anéanti. J’espère qu’il ne le sera pas avant que je me décide à partir.