Portes ouvertes et portes fermées

Pourquoi...?

Pourquoi je ne comprends pas ? Pourquoi cela m’arrive à moi ? Vivre sans vraiment vivre, et aussi mourir sans vraiment mourir… c’est incompréhensible, c’est juste tellement n’importe quoi que je ne me doutais pas que ça pouvait exister, que je me retrouverai un jour dans cet état.
Pourquoi je continue de cacher ça à ma famille ? Après tout, je ne vois pas pourquoi je devrais les ménager. Mais non, je sais que ce serait encore pire si je leur montrais ma faiblesse, ma souffrance. Ils feraient ce que font tous les gens ayant ne serait-ce qu’entraperçus mes démons : ils me considéreraient comme pire qu’eux. Je n’aurais droit qu’à leur regards fuyants ou à leur pitié insupportable.
Je me demande pourquoi je continue d’écrire ici. Ce journal disparaîtra, comme tous mes écrits papiers, je ne laisserai pas de trace de tout ça, je ne peux pas me le permettre. Et ça aussi, ça me tue. Me dire que si je ne peux pas me confier, c’est parce qu’on m’en empêche, parce que si je le fais je ne peux m’attendre qu’à recevoir des coups en réponse et rien d’autre. Quelque part, c’est autant de ma faute que de celle des autres. C’est à la fois parce que les autres sont tels qu’ils le sont et que je suis telle que je suis. C’est encore plus dur ; je ne peux blâmer personne, je n’ai rien contre quoi me défouler.
Putain, voilà que j’ai à nouveau les larmes aux yeux. Je veux pleurer et en même temps je ne le veux pas. La dernière fois, c’était quand je suis rentrée d’une soirée ; j’ai chialé dès que j’ai passé la porte de ma chambre, je l’ai refermé derrière moi et je me suis laissée tomber sur mon lit, avant de finir par m’endormir encore toute habillée. Je crois que je pleurais parce que je venais de capter que l’alcool ne pouvait me faire oublier que quelques heures de mon existence alors que j’aurais voulu en oublier la totalité.
Pourquoi je suis brisée et pourquoi rien ne semble pouvoir faire changer les choses ? Même l’attrait de l’inconnu ne me réjouit plus, maintenant. Je vais quitter le pays que je connais, quitter les gens que je vois tous les jours, mais les problèmes restent. Quand je rencontrerai de nouvelles personnes, je n’arriverai pas à enlever de ma tête cette amertume, cette espèce d’atroce certitude qu’un jour ces gens feront exactement ce qu’ont fait tous les autres, c’est-à-dire me trahir. Et aussi que si ce n’est pas eux qui me trahissent, alors c’est moi qui finirait par les décevoir.
Pourquoi je ne peux pas tout simplement me décider à en finir une bonne fois pour toutes ?