Portes ouvertes et portes fermées

"Tu m'as tellement manquée."

Je ne m’en doutais pas, mais alors pas du tout. Je ne sais pas comment j’ai fait pour ne pas m’en rendre compte. Comment j’ai fait pour ne pas avoir conscience de ce que je ressentais à ce niveau-là, au point de ne pas voir que No me manquait si fort… Et le plus étrange, c’est que c’est elle qui me l’a avoué la première. Elle m’a prise dans ses bras et m’a dit : "Tu m’as tellement manquée." Sur le moment, c’était la plus belle chose qui pouvait m’arriver. Mais bien sûr, après coup, mon angoisse refait surface. Et maintenant, je suis à nouveau nerveuse, j’ai peur, j’attends avec une horrible certitude que débarquent les problèmes. Parce que dès qu’il se passe quelque chose de bien dans ma vie, il y a toujours un contrepoids négatif qui survient. Je viens à peine de retrouver No et son amitié que j’ai déjà le sentiment que je ne le mérite pas, que c’est peine perdue, et que je ne devrais pas y croire, comme ça j’aurais moins mal le jour où tout partira en morceaux.
On a un peu parlé des autres, aussi. De "mes anciens amis" qui ont si vite tourner la page et fait une croix sur moi et les raisons de ma distance. No m’a confié qu’il lui avait fallut du temps pour comprendre mais qu’elle avait quand même fini par comprendre un tout petit peu et que ça lui avait suffit pour avoir envie de me revoir. Comment peut-elle avoir envie de me revoir ? Je souriais bêtement quand elle me disait ce genre de phrases, quand elle me montrait des preuves de son amitié. Je m’en réjouissais tant… et maintenant je me dit qu’elle réussi à agir de cette façon envers moi uniquement parce qu’elle ne voit pas qui je suis vraiment. Elle ne voit pas que dans mes sourires se cachent des pensées loin d’être innocentes, que j’ai tant souffert de la solitude que la moindre de ses étreintes me ferait presque pleurer de joie, que quand je lui dit qu’il n’y a aucun soucis et que je peux parfaitement faire une soirée avec tous nos anciens amis réunis je lui mens complètement et j’angoisse à l’avance en imaginant leurs regards pleins de jugements posés sur moi…
Dans quoi je me suis embarquée, putain ? Je le savais, je n’aurais jamais dû reprendre contact avec No. Tout comme je n’aurais jamais dû continuer de voir W. Pourquoi chercher à garder le contact avec des gens alors que je vais partir l’été prochain et les laisser tomber tous ? Est-ce qu’une part de moi fait exprès d’agir ainsi, comme pour se venger et faire subir à autrui ce que j’ai ressenti ? Je suis tellement loin d’être celle que No voit lorsqu’elle est contre moi et qu’elle me murmure à l’oreille combien je lui ai manquée…