La disparition
Petit weekend chez ma mère. D’abord, elle parle d’elle. Ensuite, elle m’explique les derniers ennuis familiaux, le plus souvent c’est mon petit frère qui se pique des crises comme les trois quart des ados de son âge. Et après viennent les sujets qui tournent autour de l’actualité, de ce qui se passe dans le monde. Je suis chez elle depuis déjà trois bonnes heures et je n’ai eu aucun question me concernant. Voilà à quoi je sert aux yeux de ma "famille" : je suis une oreille attentive, une conseillère, une personne avec qui débattre, une nana sur qui se reposer quand on est trop fatigué. Ces dans ces moments-là que je me dis que ça va être affreux quand je ne serai plus là, que je serai partie dans un autre pays mener une nouvelle vie encore plus décousue que celle que je mène actuellement. Ce sera un tel phénomène pour leurs pauvres petites cervelles… ils mettront des mois avant d’arrêter de s’affoler, j’en suis sûre. Et moi pendant ce temps, je serai dans un train, dans une voiture, ou sur une route entrain de marcher et j’aurai un putain de sourire juste parce que je penserai à ça, à ce gigantesque fuck que je fais passer en me tirant d’ici et en les dégageant une bonne fois pour toute de ma vie. La disparition sera magistrale. Je n’aurai plus à me taire et ils ne me feront plus chier avec leurs questions inutiles sur l’actualité ; je parlerai autant que je le veux et ils ne pourront plus jamais avoir la chance de m’écouter, de me découvrir, de me connaître au moins un peu, de m’aider en quoi que ce soit. Je pensais que je valais la peine d’être connue autant que n’importe qui. Il semblerait que ce ne soit pas le cas. Donc, je garderai ça pour moi, puisque personne n’en veut. Plus les jours passent et plus je me sens prête à partir…