Au cœur du cœur
La sauge brûle, sa fumée emplit la pièce. Je vois le léger brouillard, je le respire. Parfois, je me surprends à observer le sol de ma chambre, à suivre du regard les entrelacs du parquet de bois. C’est comme lorsque je regarde les nuages dans le ciel ; j’y vois des formes. Je vois des sorcières se réunirent, une tête de loutre faisant face à celle d’un ours, un géant au marteau… j’observe et découvre milles histoires. Je médite une heure, peut-être deux ; je ne compte plus le temps, je ne me préoccupe plus de l’heure. Je cherche des réponses. J’explore tout ce qui se présente à moi, je m’y plonge sans tenter d’analyser ou de réfléchir. Je cherche des réponses. Dans mon cœur. Les chants résonnent autour de moi, les voix aux paroles étranges que je ne peux comprendre, la musique et ce tambour battant font bouger mon corps, je danse sans savoir ce que je danse. Est-ce que je fête un événement heureux ? Est-ce que je fête une naissance ou une mort ? Je ne sais pas. Je célèbre quelque chose, puisque je danse et chante. Le soleil commencera à se coucher et je suivrai sa course jusqu’à temps qu’il disparaisse. Une fois qu’il fera nuit, je sortirai. Courir dans la nuit. Grimper à un arbre et m’y percher pour contempler le monde. Et chercher mes réponses. Je vais courir loin, je vais courir vite. Je veux courir jusqu’à ne plus penser qu’à courir. Esprits, dieux, fantômes… peu m’importe. Ils sont là et je peux les voir. J’avais failli les oublier, j’avais presque fini par me convaincre que ce n’étaient que pures hallucinations. Mais ils ne m’ont pas lâchée ; j’ai ressenti le besoin de les retrouver à chaque instant. Ce frémissement de joie lorsque le vent balayait mon visage, ce pincement au cœur lorsque je constatais à quel point ce dernier était vide, c’étaient des signes, des appels, des rappels de ce que je connaissais et que je n’avais jamais vraiment oublié. Bien sûr que je suis seule, que je suis triste et amère. Sauf que je suis parfois aussi quelqu’un d’autre, quelqu’un qui n’est ni joyeux ni triste. Quelqu’un qui est là et qui n’est pas là en même temps, qui ne vit ni ne meurt, qui observe et ne pense pas. Ce n’est que dans ces moments-là que je peux les voir. Et que je peux chercher mes réponses. Dans mon cœur.