Cauchemars
Les nuits ne sont pas tranquilles, pas plus que les journées. En fait, quand je ne dors pas, je me sens stressée, comme si à tout moment il pouvait m’arriver quelque chose de grave et que je devais constamment être prête au combat difficile. Et lorsque je dors, je ne peux rien faire. Mes rêves sont plus forts que moi et ils me font un amer rappel de tout ce que je tente de refouler lorsque je suis éveillée. Je fais des cauchemars dont je ne me souviens jamais ; je sais seulement que ce sont des cauchemars parce que je me réveille d’un coup et qu’ensuite je pleure jusqu’à retomber dans le sommeil.
Revoir ma mère et mon frère de temps à autre ne m’aide pas. Pas plus que de discuter avec W. J’ai pourtant essayé de me confier un peu plus, je me suis presque forcée à en révéler un peu plus sur ce que je ressens… et ça n’a rien donné. Cela me rappelle le jour où j’ai parlé avec mon père et qu’il est resté de marbre. Pourquoi c’est toujours pareil ? Pourquoi ils n’ont rien à me dire ? Quand je voudrais qu’ils se taisent et qu’ils arrêtent de dire des mots sans importance, ils continuent à jacasser, et à l’inverse quand je voudrais qu’ils me disent quelque chose, ils gardent le silence. Putain, mais sur toutes ces personnes, tous ces gens que j’ai rencontrés, c’est pas possible qu’il n’y ait pas quelqu’un qui soit capable de ne pas merder ne serait-ce qu’une fois ! Je dois vraiment être un cas désespéré.
J’ai tellement peur de ce qui va se passer. En réalité, j’ai peur de découvrir que le temps n’est pas mon allié, que les années vont passer et que rien ne va changer. J’ai peur de mon passé qui me paraît être un tissu de mensonges, de trahisons, de problèmes et d’illusions. Passé et futur me font angoisser au point de presque m’empêcher de me souvenir que le présent existe. Et lorsque je me recentre sur le présent, je n’y vois que ma solitude.
A quoi ressemblera ma vie, dans dix ans ? Il n’y aura pas de famille pour m’accueillir puisqu’une fois que je les aurais laissés derrière moi, je suis certaine qu’ils finiront par m’oublier ou me croire morte. Il n’y aura pas non plus d’amis ; je n’en ai déjà presque plus et je ne pense pas être capable de m’en faire un jour de nouveaux. Que me restera-t-il ?
Qu’est-ce que je suis entrain de devenir, au juste ? Qu’est-ce que je fais, pourquoi je cherche à m’éloigner de tout ? Pourquoi ces cauchemars surviennent-ils maintenant alors que cela fait des mois que j’angoisse à ce sujet ? Je me sens si perdue…