Portes ouvertes et portes fermées

Fenêtres

Pendant un moment, je me suis demandée si je n’allais pas changer le titre de mon journal. Remplacer les "portes" par des "fenêtres". Mais finalement, les portes, ça me correspond plus. Il y a tout un univers, avec les fenêtres. Il y a celles qui sont ouvertes, celles qui sont fermés, mais aussi celles qui ont des vitres en carreaux, celles qui ont des volets en bois, celles qui sont juste entourées d’un cadre blanc, celles qui ont des rideaux. Et on s’y retrouve souvent, à être comme fasciné par ces fenêtres. A regarder au travers de la vitre ce qui se passe dans la rue ou à marcher dans une rue, s’arrêter, et regarder par une fenêtre pour voir ce qui se passe derrière, ce qu’elle laisse entrevoir. Il y a une subtilité que possède la fenêtre et que n’a pas la porte.

J’ai un rapport particulier avec le feu. La lueur d’une bougie, les crépitements des flammes d’un feu de camp, les traits flous aux formes sans cesse en mouvement que l’on peut distinguer dans les couleurs chaudes d’un feu de cheminée lors d’une soirée d’hiver… J’ai toujours adoré le feu. J’ai appris à en faire avec tout et n’importe quoi. J’aime l’idée de maîtriser les choses tout en ne les maîtrisant pas. D’où la pensée à propos des fenêtres. On peut imaginer beaucoup de scènes grâce aux fenêtres, cependant, il y a une fenêtre que l’on ne connaîtra certainement jamais et c’est celle qui s’ouvre sur notre âme. La première fois que j’ai réussi à faire un feu toute seule était un moment spécial, un changement s’est produit en moi. On pourrait dire que ce feu m’a fait naître à nouveau. Je vais essayer de garder cette belle image en moi, cette nuit, histoire d’oublier plus facilement ce qui m’a blessé aujourd’hui.
J’ai revu mon père.
Il n’a pas changé.
J’ai fait ce que je m’étais promis, j’ai dit ce que j’avais à dire.
"On a quand même terminé en larmes, Tak. Il ne fallait pas ; cet homme ne mérite pas de nous voir pleurer à cause de lui. - Nous avons fait ce qu’il fallait. Tant pis pour les larmes. - Maintenant, il nous faut guérir."
Je n’ai plus rien à attendre de cet homme que je n’appellerai plus "père", désormais. Il est mon géniteur ; la place de père, il ne l’a plus et il ne la retrouvera jamais dans mon cœur. Peut-être fera-t-il mieux les choses avec L. Je l’espère. Qu’une de nous deux au moins soit épargnée. Mais pour moi, c’est fini ; je n’ai plus envie de croire en cette figure paternelle dont j’aurais tant eu besoin ces dernières années. Je ferai sans. J’ouvrirai une nouvelle fenêtre et je chercherai une autre façon de voir le monde. Je referai un feu, un feu qui ramènera peut-être un peu de vie en moi.